Ce 13 décembre marque le 25e anniversaire de l’assassinat du journaliste d’investigation Norbert Zongo, alors Directeur de publication de l’hebdomadaire L’Indépendant. Hommage lui a été rendu ainsi qu’à ses trois compagnons d’infortune. Les acteurs des médias et de nombreux citoyens se sont mobilisés pour réclamer justice. Le président du Mouvement burkinabè des droits de l’homme et des peuples (MBDHP), Chrysogone Zougmoré, s’exprime à ce sujet.
24heures.bf : 25 ans que vous luttez pour la justice dans l’affaire Norbert Zongo. Où en est le dossier aujourd’hui ?
Chrysogone Zougmoré : Vous avez constaté la force de mobilisation ce 13 décembre. C’est l’expression de la détermination renouvelée du peuple burkinabè pour que vérité et justice soient faites à Norbert Zongo et à ses compagnons d’infortune.
L’arrêt du dossier en ce moment fait suite à la décision de la Cour européenne des droits de l’homme de ne pas extrader François Compaoré (le présumé commanditaire de l’assassinat, Ndlr). La seule alternative raisonnable qui nous reste, c’est le jugement par contumace; c’est-à-dire le jugement en l’absence de François Compaoré. C’est une possibilité qui s’offre à nous et je pense que c’est cette possibilité que nous allons exploiter.
Pourquoi, de façon fondamentale, pensez-vous qu’il faut que justice soit faite à Norbert Zongo 25 années après son assassinat ?
L’impunité a la peau dure. Norbert Zongo est mort pour une cause, une cause noble, une cause que nous devons toujours défendre, quel que soit le prix à payer. Il est mort pour la liberté; il est mort pour la justice; il est mort pour la bonne gouvernance. C’est un symbole que nous devons défendre. Voilà pourquoi 25 années durant, nous avons tenu débout pour faire en sorte que justice soit rendue à Norbert Zongo.
Norbert Zongo est une icône. Nous allons au-delà de Norbert Zongo : nous-nous battons pour que les espaces de libertés pour lesquelles il s’est battu soient garantis, quelles que soient les circonstances. Aujourd’hui, les journalistes sont sous la pression. Norbert Zongo était sous la pression jusqu’à ce qu’on l’élimine. Il est temps pour nous aujourd’hui de veiller à ce que ce qui s’est passé en 1998 n’arrive pas à un journaliste aujourd’hui, ni à un quelconque citoyen pour l’expression de sa liberté, le fait de donner son opinion sur la gestion du pouvoir d’État.
Plusieurs gouvernements se sont succédé mais l’affaire n’est toujours pas jugée. En tant que membre du MBDHP, avez-vous déjà été l’objet de menaces dans le cadre de votre quête de justice pour Norbert Zongo ?
Des menaces, non ! Mais nous avons connu des gouvernements qui ont joué au sourd. Le dossier a été bloqué tout au long du règne du président Blaise Compaoré et du régime du CDP. Ce n’est qu’à partir de 2015 qu’il a été rouvert. En tant que mouvement, nous nous sommes toujours battus sans crainte. Vous savez, au début des années 2000, à partir de 1999 surtout, il y a eu une très forte pression, pas seulement sur le MBDHP, mais aussi sur le Collectif des organisations démocratiques de masse et de partis politiques. Des militants de partis ont été menacés; des militants de mouvements également. De même que des syndicalistes. Mais, passé cet épisode, nous avons ténu le cap. Et comme je l’ai dit, 25 ans après, nous sommes toujours débout et nous espérons que justice sera faite.
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Lucien Kambou