Le monde chrétien célèbre le 25 décembre de chaque année, la naissance de Jésus-Christ. Noël en français ou Christmas (la messe de Christ) en anglais va parfois au-delà du cercle chrétien. Ce personnage emblématique considéré comme le Sauveur de l’humanité par les chrétiens est cependant “plus jeune que la fête de Noël”, affirme le Docteur Sié Daniel Kambou, théologien, formateur de pasteurs et vice-recteur de l’Université évangélique Koinonia dans cette interview.
24heures.bf : C’est quoi Noël selon la théologie chrétienne ?
Sié Daniel Kambou : Noël provient du latin “natalis dies” qui veut dire “jour de naissance”.
Noël dans un premier temps n’était pas une fête chrétienne. C’était une fête païenne appelée “la fête du soleil”.
C’est vers l’an 300 de notre ère que cette fête a été transformée en fête chrétienne. Comme, à l’époque, l’empereur romain s’était converti, beaucoup de personnes sont entrées dans l’église mais voulaient toujours fêter. L’une de leurs grandes fêtes était la fête du Soleil.
Si le christianisme a réussi quelque chose en ce qui concerne la culture, c’est effectivement Noël.
Il a réussi à récupérer ce phénomène social pour le rendre accessible aux chrétiens et pour lui donner un contenu biblique.
On sait que Jésus est “le soleil du levant”, raison pour laquelle on a essayé de faire un lien avec cela.
Dans chaque culture, Dieu a déposé un pré-évangile, des éléments qui attendent que le Christ se révèle.
La culture ne vient pas de Satan, c’est Dieu qui l’a créée. Sauf que Satan a cherché à polluer cette culture.
La fête du soleil pour nous chrétiens, c’est la graine, un élément d’attente pour que le Christ vienne se révéler. Les théologiens appellent cela “les pierres d’attente”.
Dans cette culture, il y avait cette pierre d’attente, cette semence qui attendait la révélation de Christ.
C’est comme nous, on n’est pas né chrétien. Mais en chacun de nous est déposée quelque chose qui prépare notre réception du Christ.
Si cela est possible sur le plan personnel, il en est de même sur le plan social et culturel.
Dieu a déposé des choses pour que son Fils puisse se révéler. Voilà comment la fête de Noël est arrivée.
Le 25 décembre n’était pas la première date choisie, il y avait janvier, ensuite une autre avant qu’on arrive à cette date.
Pourquoi le 25 décembre comme date conventionnelle pour la célébration de Noël ?
En Occident, à une certaine date, il y a eu un changement dans les astres.
Ce changement a amené les gens à choisir cette date car sur le plan astral, il y a des signes. C’est beaucoup plus adapté à la fête.
Faites-vous référence à l’histoire biblique portant sur le rôle des mages qui auraient rejoint le petit-Jésus, guidés par une étoile?
Ce n’était pas la raison principale. Mais d’un point de vue biblique, on pourrait éventuellement faire référence à cela.
Pourquoi Noël est plus célébrée que les autres fêtes chrétiennes alors qu’elle n’a pas, comme vous le dites, de fondement biblique ?
On ne peut pas dire que Noël n’a pas une origine biblique.
Etant donné que le Christ est né, c’est un fait. Historiquement, on sait qu’il est né mais quand ?
C’est ce qu’on ne sait pas. Dieu a bien fait les choses ainsi. Si les gens savaient exactement à quelle date Jésus était né, ce jour serait adoré d’une certaine façon.
Certains pousseraient même leur femme à accoucher à cette date précise.
Sur le plan théologique, Noël est la conversion d’une fête païenne pour que cela corresponde à la naissance de Jésus qui est un fait.
Certes, beaucoup de gens ne fêtent pas Noël parce qu’ils disent que c’est beaucoup plus une fête païenne.
Mais il ne faut pas que les gens se remuent trop !
Les jours de la semaine que nous avons sont des jours de dieux.
Même le dimanche, pourquoi allons-nous à l’église ? Le dimanche, c’est le nom d’un dieu et les anglais l’ont gardé : Sunday (sun day) qui veut dire “le jour du soleil”.
Si on ne veut pas fêter Noël, on ne devrait pas non plus aller à l’église le dimanche. Il faut être sur les principes.
Si nous savons que Satan n’a rien créé et qu’il est là pour usurper ce que Dieu a, nous devons aussi comprendre que cette “fête du soleil” ne veut pas dire que c’est Satan qui l’a créée, mais il tente d’usurper quelque chose que Dieu a voulu accorder aux hommes.
Maintenant, c’est à l’Église de retirer ce que Satan est venu prendre.
C’est dans ce sens que je comprends Noël. Certes, beaucoup de gens célèbrent Noël mais ce que Noël est aujourd’hui se détourne beaucoup plus de ce que la Bible nous demande.
C’est la naissance du Sauveur et cela nous interpelle pour que nous puissions donner nos vies à ce Sauveur.
Or, aujourd’hui, malheureusement, ce n’est pas souvent le cas. Même quand je n’étais pas encore chrétien, on fêtait Noël.
Nous organisions des soirées dansantes car pour nous, c’est une fête comme toutes les autres fêtes. Mais Noël devrait aller au-delà de son aspect festif.
Quand vous allez en Europe et même ici en Afrique, Noël est devenu aujourd’hui un temps de commerce où on peut vendre ses articles.
D’autre part, c’est la fête de la famille. Certaines personnes ne viennent pas à l’église mais pendant Noël, elles font tout pour réunir la famille. C’est l’une des interprétations de Noël.
Aujourd’hui, Noël, comme le Christ lui-même, est interprété de plusieurs manières. Jésus est compris de plusieurs manières; sa naissance est aussi interprétée de plusieurs manières.
Les gens fêtent comme ils le conçoivent. Certes, la Bible ne nous dit pas expressément de quel jour il s’agit comme c’est le cas pour la Pentecôte ou la Pâques, mais la Bible dit que Jésus, le Christ est né.
C’est un fait. C’est à nous de voir si on veut fêter ou pas. Ceux qui fêtent Noël, c’est bien. Ceux qui ne le font pas, c’est leur conviction et on ne peut pas leur en vouloir.
A vous entendre, il est difficile d’un point de vue biblique, de situer exactement la naissance de Jésus dans le temps…
Exactement ! Les Évangiles nous montrent que Jésus est né au temps d’Hérode mais on ne sait pas quand exactement. On connaît la période; c’est du temps du roi Hérode. Quand on regarde aussi la saison, la Bible dit qu’à sa naissance, il y avait des bergers qui gardaient leurs troupeaux et que les anges leur sont apparus. Tout cela constitue, chez les théologiens, des débats. Certains estiment que si c’était en hiver, il serait difficile pour ces bergers d’être dehors, dans le froid.
Il y a beaucoup de discussions là-dessus chez les théologiens. Je préfère que la date exacte ne soit pas connue. Si tel était le cas, les hommes étant beaucoup idolâtres, ils adoreraient ce jour. Or, Dieu haït l’idolâtrie. À propos de l’année de naissance de Jésus, conformément à notre calendrier actuel, certains estiment même qu’il faut ajouter un ou deux ans de plus.
Je pense que cela a été voulu par Dieu et il ne faut pas forcer les choses.
Selon vous, comment le chrétien devrait-il célébrer Noël ?
Si le chrétien veut fêter Noël, il doit d’abord s’interroger sur le sens de Noël.
Le chrétien doit comprendre que Noël, c’est cette action d’amour de Dieu qui envoie son fils dans un monde révolté contre lui, afin de réconcilier ce monde avec Dieu lui-même.
Noël, c’est d’abord une fête de l’amour. Elle nous rappelle l’amour de Dieu pour le monde.
C’est une fête de l’amour qui doit être une occasion de partage parce que qui aime donne.
Pendant Noël, le chrétien doit comprendre que c’est le lieu de manifester son amour vis-à-vis de Dieu mais aussi envers son prochain. Cet amour se manifestera par le partage. C’est l’une des choses essentielles.
Le chrétien devrait aussi pendant Noël, écouter les enseignements en rapport avec la nativité, en rapport avec les évènements qui se sont passés avant la naissance de Jésus, pendant et même après la naissance de Jésus.
Au-delà de la fête, il doit s’asseoir pour écouter la parole de Dieu.
Écouter la parole, prendre conscience que Noël est un temps de partage et la fête d’amour doivent aller de pair.
C’est une fête d’amour parce que l’amour de Dieu vient à nous et nous invite à aimer notre prochain.
Dans ces temps qui courent, où il y a beaucoup de violences, des vies sont ôtées.
Noël doit être le lieu où on interpelle le chrétien pour le partage de l’amour parce que nous vivons en humanité.