A la UnePalais de Justice

Affaire de viol présumé à l’hôpital Yalgago Ouédraogo : Dossier mis en délibéré pour le 4 avril

Le procès sur l’affaire du “présumé viol à l’hôpital Yalgago Ouédraogo” a repris ce 28 mars au tribunal de grande instance Ouaga 1. Trois témoins sont passés à la barre. Il s’agit de Dr Bonkoungou, Médecin-chef du service des urgences de l’hôpital, Mme Abi Diallo/Ouattara et de Dr Maïmouna Konaté. Le prévenu, Monsieur K. ne reconnaît pas les faits. La partie civile, elle, estime qu’il y a bel et bien eu viol et souhaite que “la victime” puisse bénéficier du remboursement des frais d’examen et de déplacement. Elle réclame également le paiement d’une amende de 20 millions FCFA à payer à “la victime”. Le dossier a été mis en délibéré pour le 4 avril.

Les avocats constitués partie civile réclament le remboursement des frais d’examen de dame Z., considérée comme la victime dans cette affaire. Ces frais s’élèvent à 62 900 FCFA. Ils réclament aussi les frais d’ordonnance évalués à 12 895 FCFA, ainsi que les frais de carburant (100 000 FCFA). “La victime n’ayant pas de moyen de déplacement, ce sont les amis de son époux qui vont la chercher chaque fois à Gampèla pour les différentes démarches”, ont-ils affirmé. La partie civile réclame en outre 20 millions FCFA au titre des dommages et intérêts. Mais en réalité, dit-elle, “le préjudice subi est irréparable”.

Les avocats de la partie civile disent être convaincus qu’il y a eu viol d’autant plus que leur cliente est restée constante dans ses déclarations depuis le début de l’affaire. Aussi, le certificat médical indique que la “victime” montrait une marque de piqûre à l’endroit où elle dit avoir été piquée. Il y a donc eu injection de produit, argumentent-ils devant les juges . “Elle n’était ni malade, ni hospitalisée, pourquoi lui injecter donc des médicaments? Aussi, qu’avait notre cliente à fourrer son nez dans des histoires de sexe pendant que son mari était dans un état critique ?”, interrogent les conseils de Z. Selon eux, le rapport établi démontre que le prévenu a demandé pardon. “Du fait de l’agent de santé, dame Z a accédé à la salle de garde des infirmiers”, poursuivent-ils.

Le prévenu, lui, rejette en bloc les témoignages. Mais la partie civile insiste : “Quand on se comporte ainsi, c’est qu’on se reproche quelque chose. La constance des faits confirmés par les témoignages indiquent que le prévenu a effectivement abusé sexuellement de notre cliente”.

“Si le service avait fonctionné correctement… »

Il y a eu également, selon eux, des circonstances aggravantes. “L’agent de santé a profité d’une situation dans laquelle dame Z était diminuée du fait de la maladie de son mari. Le prévenu a usé de son statut d’agent de santé pour poser l’acte”, ont-ils déclaré.

« Nous avons pris le soin de convier à votre barre, l’hôpital Yalgado qui a un statut particulier”, ont-ils ajouté. Et de poursuivre : “Si le service avait fonctionné correctement, Monsieur K n’aurait pas pu commettre son acte. L’hôpital Yalgado a fait preuve d’une négligence grossière; voilà pourquoi cela a pu se passer”. La même faute peut, selon eux, entraîner la responsabilité de l’agent et de son administration. La partie civile demande donc que l’hôpital paie à dame Z., la somme de 1 500 000 FCFA.

Les conseils du prévenu, eux, pensent que l’on tourne autour du pot depuis 21 jours pour débattre de ces faits. Selon eux, il faut laisser la science parler. “Les résultats des examens ont démontré que dame Z. n’avait pas mal au moment des examens et aussi son col était bien ferme et fermé; ce qui signifie qu’elle n’avait pas eu de rapports sexuels pendant au moins une à deux semaines”, affirme la défense. Qui ajoute que le certificat médical ne date pas du 9 janvier comme le faisaient croire les avocats de la partie civile mais plutôt du 6 janvier. Les avocats de la défense estiment en outre que leur client est resté constant dans ses déclarations tout au long du procès. Affirmant avec force n’avoir pas “abusé sexuellement de la dame”.

Il ne reconnaît pas les faits et cela corrobore, selon eux, le contenu du certificat médical. “Notre client a juste demandé pardon parce que les accompagnants de dame Z avaient menacé d’appeler les groupes d’ auto-défense communément appelés kogl-wéogo”, indiquent-ils. La défense affirme donc que l’infraction n’a jamais existé.

Selon l’agent judiciaire de l’État, l’infraction dans cette affaire est personnelle. “Ce n’est pas parce que la faute a été commise dans un service que la responsabilité du service est engagée”, a-t-il affirmé. Aussi, a-t-il demandé au tribunal de mettre l’hôpital “hors de cause”. L’hôpital invite par ailleurs la partie civile à lui payer la somme de 500 000 FCFA pour “le préjudice subi”.

“Il l’a piquée (…) et elle s’est laissée faire”

Selon le parquet, la violence est l’essence même du viol. Elle n’est pas, selon lui, forcément physique. Mais elle exerce un effet sur la victime de sorte qu’elle se soumette. “Il l’a piquée (…) et elle s’est laissée faire”, affirme le parquet. Pour qui, dans cette affaire, le mobile importait peu. Même s’il reconnaît que les faits ont beaucoup été contestés.

Le prévenu dit avoir examiné dame Z pour s’assurer qu’elle ne souffrait pas du même mal que son mari ou qu’elle n’en était pas à l’origine. Il ne reconnaît pas avoir amené la victime dans la salle de garde. Il dit avoir posé des questions à la dame. Et entre-temps, il se serait rendu compte qu’il n’avait pas son stylo et serait allé dans la salle de garde pour le chercher.

Toujours selon le prévenu, la dame le suivait et se plaignait de sa belle-famille qui ne l’aurait pas soutenue depuis que son mari a été admis à l’hôpital. Sanglots entre-temps quand il a essayé de la rassurer alors qu’elle commençait à perdre espoir. C’est là qu’il a essayé de la réconforter. Le mis en cause nie avoir emmené la dame dans la salle.

“La victime a fait une description parfaite de l’endroit. Comment y est-elle parvenue si elle n’a jamais été dans la salle?”, s’interroge le parquet. Huit témoins ont été entendus dans cette affaire. Parmi eux, des agents de salle, des infirmiers et des médecins. Certains d’entre eux ont déclaré que le mis en cause les a sollicités afin de “demander pardon à la famille de la victime pour lui”.

“Comment une telle dame, à l’âge de 26 ans, mère de 4 enfants, vient porter de telles accusations sans oublier que cela met à nu son intimité?”, s’interroge le parquet. Et il poursuit : “La victime a été prise en charge cinq jours après. Au-delà de 3 jours, difficile de détecter encore les spermatozoïdes dans le vagin, surtout qu’elle s’est lavée plusieurs fois”.

Toujours selon le parquet, Monsieur K. a bel et bien violé, pas seulement une fois mais à deux reprises : “La première fois, il a introduit ses doigts dans les parties intimes de la dame. Et ce ne sont pas des accusations infondées”.

“Pas de clémence qui tienne !”

“A cause de quelqu’un qui ne sait pas contrôler son pantalon, on vient bafouer l’image d’une institution comme Yalgado”, se désole le parquet.

Cette dame n’aurait pas dû, selon lui, quitter l’hôpital sans être prise en charge psychologiquement. Les agents de l’hôpital ont manqué à leur devoir, estime le parquet. Qui invite le tribunal à accorder du crédit aux témoignages donnés.

Selon lui, les premiers témoins ont été formels. Plusieurs personnes ont retrouvé, dit-il, la dame en pleurs. “Comment cette dame à la limite pas instruite, a-t-elle pu imaginer ça ?”, s’interroge le parquet. Et il est formel : “Pas de clémence qui tienne dans cette affaire”. Il a alors requis une peine de 10 ans et une amende de deux millions FCFA contre le prévenu.

………………………………………

 Trois témoins à la barre…

Dr Maïmouna Konaté et Mme Abi Diallo/Ouattara (ingénieure des sciences infirmières et obstétricales) ont été appelés à la barre ce matin.

Mme Diallo/Ouattara affirme que le prévenu leur a dit qu’il avait courtisé dame Z et l’avait amenée dans la salle de garde.“Je ne reconnais pas avoir dit que j’ai courtisé la dame ni que je l’ai amenée dans la salle de garde pour abuser sexuellement d’elle”, rétorque le prévenu.

Dr Konaté est la troisième personne à passer à la barre. Elle affirme avoir croisé la victime en pleurs et lorsqu’elle l’a interrogée sur les raisons de ses pleurs, elle aurait déclaré avoir été piquée par un agent de santé et se serait évanouie. Un terme qui va susciter des interrogations de la part des conseils du prévenu. Selon eux, ces propos de la victime qui aurait dit à Dr Konaté qu’elle s’est évanouie après l’injection, ne concordent pas avec ses autres déclarations où elle disait avoir été affaiblie après l’injection mais qu’elle était toujours consciente. Cela est-il dû au fait que la victime s’exprimait en langue mooré ? Il a donc été demandé à Dr Konaté de redire exactement, dans les termes de la dame, ce qu’elle a entendu. Ce qui fut fait. Et à l’interprète de souligner que la victime lui a simplement signifié qu’elle avait des vertiges pas qu’elle était évanouie. Plusieurs autres questions-réponses s’en suivront. A l’issue des trois témoignages, le président du tribunal a déclaré que la juridiction a suffisamment été édifiée dans cette affaire.

En rappel, les faits remontent au 5 janvier dernier. La présumée victime qui accompagnait son époux malade (décédé par la suite) a saisi la Brigade ville de gendarmerie de Nongremassom pour des faits de viol sur sa personne par un agent de santé. Les faits se seraient déroulés au bloc des urgences de l’hôpital.

NDLR : Pour des raisons d’éthique, nous avons remplacé les identités du prévenu et de la victime présumée par des initiales.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Articles similaires

Bouton retour en haut de la page