L’ombre de Moussa Diallo, Secrétaire général de la Confédération générale des travailleurs du Burkina (CGT-B), a fortement plané sur le 8è Conseil syndical de cette organisation, tenu les 25 et 26 octobre, à Ouagadougou. Les congressistes ont haussé le ton, estimant que son licenciement, en avril dernier, était « une tentative de museler la voix des travailleurs ». Une atteinte aussi aux droits fondamentaux des citoyens, ont-ils insisté. Tout en demandant qu’il soit « réintégré » dans les meilleurs délais.
Les participants dépeignent un tableau sombre depuis l’arrivée du MPSR 2. Dans la liste des récriminations, trônent, par exemple, les atteintes aux droits fondamentaux des citoyens : intimidation de militants syndicaux, répression croissante des voix dissidentes, restriction des manifestations publiques… Ils estiment d’ailleurs que le licenciement, le 25 avril 2024, de Moussa Diallo, alors Secrétaire général de la CGT-B, est un « acte de répression directe envers le syndicat ». Et qu’une telle façon de procéder porte atteinte au droit à la liberté syndicale.
Tout cela vise, selon la CGT-B, « à imposer à notre peuple de payer les frais de la crise du système capitaliste néocolonial par la mise en place d’un régime où le seul droit reconnu et autorisé au citoyen est celui de se soumettre, sans murmure, à la transition ; ce qui s’appelle « patriotisme », aucun écart, ni voix discordante n’étant tolérés ». Le Secrétaire général adjoint de la centrale syndicale, Nicolas Ouédraogo, l’a affirmé, avec force, à la clôture du Conseil syndical. « Nous souhaitons que le pouvoir reconsidère sa position et respecte les droits fondamentaux des Burkinabè. C’est important pour que nous puissions également dire que nous sommes dans un Etat démocratique », a-t-il ajouté.
Dans tous les cas, la CGT-B n’entend pas baisser les bras. Elle a d’ailleurs exprimé sa farouche détermination à ne pas se laisser ébranler par les secousses politiques de la Transition. « La CGT-B reste et demeure elle-même. Elle va poursuivre son combat », affirme Nicolas Ouédraogo. Tout en invitant les militants à la vigilance et à la mobilisation.
En avril dernier, le gouvernement, réuni en Conseil des ministres, avait pris la décision de licencier trois enseignants-chercheurs. Parmi eux, Moussa Diallo, Assistant en philosophie, affecté au Centre universitaire de Manga (CUM). Un centre rattaché à l’Université Norbert Zongo. Le gouvernement lui en voulait d’être « en situation d’absence irrégulière de son poste de travail depuis le 08 décembre 2023 ».
En réalité, Moussa Diallo était recherché par les services de sécurité. Il a même failli être enlevé le 29 janvier. Un collectif de centrale syndicale et de syndicats autonomes, tous du domaine de l’enseignement et de la recherche, était aussitôt monté au créneau pour dénoncer cette pratique. «Le camarade n’a échappé à son enlèvement que grâce à l’intervention des voisins et militants de la CGTB. Cette tentative d’enlèvement fait suite à l’appel lancé par un groupe d’organisations dont le Collectif CGT-B pour la commémoration de l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014. Les partisans du MPSR 2 avaient alors menacé les organisateurs de les attaquer à la machette sans qu’aucune réaction ne vienne de la part du gouvernement ».
Un climat délétère s’était alors installé entre les syndicats et le gouvernement. Même si Moussa Diallo continuait d’exercer son boulot. « Le camarade continuait d’assumer ses obligations d’enseignant et ce, même après son enlèvement avorté. Il a ainsi corrigé et transmis au CUM les copies de ses étudiants et il a proposé un sujet de rattrapage qui a été administré à ses étudiants le 25 mars 2024 de 15h à 17h », avaient rappelé les syndicats. Mais il a finalement été licencié. Sous le prétexte qu’il n’a pas rejoint son poste malgré un communiqué qui l’enjoignait de le faire. « L’adoption de ce décret permet le licenciement de la Fonction publique de Monsieur Moussa Diallo, Mle 105 092 R, enseignant-chercheur, pour abandon de poste à compter du 02 mars 2024 ». Ainsi en a décidé le Conseil des ministres du 25 avril.