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Burkina Faso/Procès charbon fin : “Cette formation du parquet ne peut pas continuer ce procès avec nous” (Avocats de la défense)

Deux débats ont marqué l’audience de ce 5 décembre. La production des “données RSD” par les experts judiciaires et la production de la “preuve que le laboratoire aux USA a reçu les 8 tonnes d’échantillons de minerais exportés par la société Iamgold Essakane SA” (objet des débats hier). Un incident d’audience s’est également produit.

Au début de l’audience, le procureur a souhaité avoir auprès des experts judiciaires les données RSD dans le cadre de l’expertise et les données brutes issues de l’expertise.

Les données RSD sont une variable statistique qui permet de mesurer la dispersion des mesures. On regarde si les données obtenues sont concentrées, où est-ce qu’elles sont dispersées.

Dans le cadre de notre expertise minière, nous avons eu recours à des laboratoires certifiés ISO17-25. Cette certification permet de certifier le personnel, le matériel et les procédures”, explique l’un des experts.

C’est quoi tout simplement ?”, demande le président du tribunal.

Ce sont des coefficients de variation de mesures”, répond-il. 

Les avocats de la défense s’opposent à la production de ces données.

Lorsque le rapport a été déposé, un temps a été donné pour faire les observations. Le rapport d’expertise a été déposé. Il n’est plus question de revenir là dessus” lance Me Pierre Yanogo, avocat de la société Iamgold Essakane SA.

Est-ce que la production de ces données influe sur la qualité du rapport ?,  interroge le président du tribunal.

“Non”, répond l’expert. 

Le président du tribunal instruit alors les experts de produire les données RSD ainsi que les données brutes. 

L’avocat de l’Etat, Me André Ouédraogo, expose, lui aussi, ses requêtes. Au cours de l’audience du 30 novembre, il a demandé à Essakane SA de produire des pièces qui attestent que le ministre a été saisi quand le directeur général des mines a signé l’autorisation spéciale d’exportation de 399 tonnes de charbon fin. 

“Nous voulons aussi une preuve que le laboratoire aux USA a reçu les 8 tonnes d’échantillons de minerais (NDLR objet des débats hier)”, a-t-il demandé.

Les avocats de la défense opposent un refus. “On ne peut pas nous faire comparaître et demander des pièces pour étayer les infractions. Si on n’est pas prêt, on ne demande pas à juger quelqu’un. Tout ça, c’est du dilatoire pour faire durer le procès”, lance Me Moumouni Kopiho.

Me Pierre Yanogo, lui, ne voit pas pourquoi on les obligerait à produire des pièces pour justifier des faits pour lesquels ils ne sont pas poursuivis.

Le procureur rappelle que la société Iamgold Essakane SA a assuré qu’elle produirait les pièces demandées par l’Etat. “S’ils ne veulent plus produire les pièces, qu’ils le disent et on saura que ces démarches n’ont jamais été entreprises”, tonne-t-il avant d’affirmer que “l’administration ne fonctionne pas de bouche à oreille. Il y a toujours un document qui atteste de ce qui s’est passé; c’est ce que nous demandons”.

Me André Ouédraogo se dit “sidéré”. “Ils ont promis de produire les documents. On ne sait même plus si ces documents-là existent. Il faut que votre juridiction donne une décision”, dit-il en interpellant le président du tribunal.

Pendant que la défense a la parole, Me André Ouédraogo, avocat de l’Etat, rejoint le parquet pour “échanger”. La défense se plaint. Le procureur visiblement agacé affirme : “Nous sommes avec l’Etat. Nous sommes ensemble”.

Le ton monte entre le parquet et la défense. Le président du tribunal suspend l’audience. Au bout de 30 minutes, elle reprend. 

Je vais inviter toutes les parties à la sérénité. Nous n’avons pas besoin de spectacle ici. J’invite toutes les parties à aller sur les règles de procédure, notamment pénale. Ceci étant, le tribunal considère que le sujet est clos. Nous allons étudier les points de droits exposés par toutes les parties”, déclare le président.

Il a été demandé la production des pièces à la défense; la personne débitrice de ces pièces a produit celles justifiant ses intérêts. Vous en tirerez les conséquences”, continue le président du tribunal.

La défense demande une nouvelle composition du parquet

Même si les faits ne sont pas établis, le parquet qui dit être avec l’Etat, va requérir la condamnation de nos clients. Nous estimons que cette formation du parquet ne peut pas continuer ce procès avec nous. S’ils sont là, nous ne serons pas là”, affirme la défense.

Le parquet se dit surpris. 

Le procès pénal secourt la société et c’est encore plus pour la victime. Je ne peux pas comprendre que le ministère public soit contre la victime, c’est juridiquement contraire”, affirme le procureur.

“Tout au long du procès, on a assisté à une concertation permanente entre le ministère public et l’Etat. Je n’ai jamais vu pareil défilé entre l’Etat et le ministère public. Lorsqu’on est à l’audience, le parquet doit garder la neutralité”, lance Me Ali Karambiri.

Le président rappelle que concernant la formation du parquet, une exception a été jointe au fond. Il précise qu’il ne reviendra plus sur la question. 

L’audience continue avec la comparution du représentant de l’administration douanière.

 

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