D.S et D.H sont présentés, le 13 juin 2023, à la barre du tribunal de grande instance Ouaga 2. Le premier reconnait, sans ambages, être un combattant des forces terroristes. Il est condamné à la perpétuité. D.H, lui, écope de 21 ans de prison dont 10 fermes.
Avant sa comparution à la barre, D.S fait un malaise. L’audience est suspendue pour cinq minutes. A la reprise, il semble avoir retrouvé ses esprits. Il est conduit à la barre. Le président du tribunal lui notifie les charges qui pèsent contre lui.
Il est poursuivi pour des faits « d’association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste, assassinat et attentat à l’explosif à caractère terroriste« .
Il reconnaît sans ambages les faits. « (…) Nous recherchons le moyen d’atteindre le pouvoir, instaurer notre armée et répandre nos convictions religieuses. (…) », déclare D.S à la barre.
Son histoire avec le terrorisme remonte à 2015. Il se rend au Mali pour renforcer, dit-il, ses convictions religieuses. Une fois sur place, il entend parler d’un groupe terroriste. Il se reconnaît parfaitement dans leur idéologie et demande à intégrer le groupe. Il est accepté et suit une formation.
« J’ai suivi une formation pour la pose de mines au Mali. On fabrique la bombe, on me la remet et je pars la poser (…) », indique le prévenu.
D.S affirme qu’il sensibilise d’abord les gens et lorsqu’ils refusent d’adhérer, il les tue. Le président du tribunal lui demande s’il a déjà arrêté un convoi de FDS pour sensibilisation. » Nous ne pouvons pas sensibiliser ces gens. Quand ils nous voient, c’est le combat ; ils cherchent à nous éliminer. Nous suggérons que nous nous rencontrions et que nous échangions. On va s’entendre », répond-t-il.
Alors que toute la salle est ébahie par les déclarations du prévenu, le président lui demande de donner la partie exacte du Coran qui stipule qu’il faut tuer celui qui ne suit pas les règles islamiques. Là, il titube, attestant qu’il ne maitrise pas le Coran. « Moi-même je n’ai pas étudié à fond le Coran », finit-il par lâcher, suscitant un brouhaha dans la salle.
D.S est capturé en fin juin 2018, lors d’un ratissage effectué par les Forces de défense et de sécurité à Déou, dans la province de l’Oudalan, région du Sahel. Il a combattu pour deux groupes terroristes. Il a participé à des attaques au Mali, causant la mort de plusieurs personnes. Au Burkina, il a posé des mines qui ont ôté la vie à des éléments des FDS et à des civils. Sa zone de prédilection était Nassoumbou, dans la province du Soum.
Invité dans le terrorisme par un ami d’enfance …
D.H, lui, est âgé de 29 ans. Il est berger et comparaît également ce 13 juin. Il est poursuivi pour « association de malfaiteurs au sein d’une entreprise terroriste ». Lors des enquêtes et devant le juge d’instruction, il affirme avoir été approché par son ami d’enfance en 2019 pour intégrer un groupe terroriste implanté dans une forêt dans le département de Dori. Il dit avoir refusé de rejoindre le groupe dans cette forêt. Mais il ne décroche pas pour autant. Il informe les éléments de ce groupe des différents mouvements des Forces de défense et de sécurité.
Cependant, ce 13 juin, devant le tribunal, il nie en bloc. » Je ne sais pas ce que j’ai fait. Je ne travaille pas avec les terroristes. Mon ami m’a menacé de mort. J’ai juste accompagné les terroristes une fois de Tarpago à Koudponsgo sous menace. Je n’ai jamais appelé pour donner une position des FDS ».
Ces démentis ne convainquent pas le procureur, qui égrène les détails de l’arrestation de D.H: « De sa maison, il a vu la patrouille des militaires. Et il a appelé pour signaler cela. L’ordre lui a été donné de vérifier qu’il s’agit bien de FDS. C’est en voulant vérifier, qu’il a été appréhendé ». Le procureur affirme que le portable du prévenu a été analysé par l’Agence nationale de renseignement (ANR). Il ressort de ces analyses qu’il est en contact avec des personnes recherchées.
Le procureur estime également que D.H connaît parfaitement les noms des terroristes du groupe, ce qui ne peut être anodin.
Au regard de tous ces éléments, le parquet a requis la perpétuité pour D.S. Ce dernier a été finalement reconnu coupable des faits d’association de malfaiteurs au sein d’une entreprise terroriste, d’assassinat et d’attentat à l’explosif. Il a ainsi été condamné à une peine d’emprisonnement à vie.
Concernant D.H, le parquet a requis une peine d’emprisonnement de 21 ans assorti d’une période de quinze ans ferme. Il a été quelque peu suivi par le tribunal. D.H écope de 21 ans d’emprisonnement dont 10 ferme assortis d’une période de sûreté de 8 ans et de 11 ans avec sursis. Il a affirmé ne pas être d’accord avec ce verdict. Le président du tribunal l’a alors informé qu’il pouvait faire appel de la décision.