L’ex-président de la Côte d’Ivoire, Henri Konan Bédié, s’est éteint dans la soirée du 1er août à l’âge de 89 ans. Des membres de la communauté ivoirienne au Burkina Faso, contactés par 24heures.bf, retiennent de lui « un baobab qui a contribué à l’édification de son pays ». Ils espèrent toutefois la naissance d’un visage nouveau de la politique ivoirienne à travers ce décès.
« HKB », comme on le surnomme affectueusement, a passé l’arme à gauche le 1er août. Il a occupé le fauteuil présidentiel du 7 décembre 1993 au 24 décembre 1999. Il devient chef de l’État après la mort de Félix Houphouët-Boigny, premier président de Côte- d’Ivoire. Il est renversé, en 1999, par un coup d’État mené par le Général Robert Guéï.
Une bibliothèque a brûlé
« Je retiens que c’est un imposant chapitre de l’histoire de la Côte d’Ivoire qui se referme avec la disparition de ce grand homme politique », déclare d’emblée, une dame, membre de la communauté ivoirienne, ayant requis l’anonymat.
« Je retiens du parcours du président Bédié, celui d’un grand homme d’état, un parcours très riche, vu qu’il a presque occupé tous les grands postes de responsabilité de son pays. Il a su garder le cap après la mort du père fondateur; il a stabilisé le PDCI (Parti démocratique de Côte d’ivoire », loue à son tour Esaïe. Pour lui, « HBK » est digne d’être appelé « un démocrate ».
« Il a été renversé par un coup d’État mais il n’a jamais souhaité reprendre le pouvoir par un coup d’État », continue-t-il.
« Ivoirité »
Le concept d’ivoirité est apparu en Côte d’Ivoire autour des années 1994 sous l’égide de Henri Konan Bédié. Il était assimilé à la xénophobie. Il consistait à faire la différence entre les vrais Ivoiriens et les « étrangers ». Étaient considérés comme de vrais Ivoiriens, ceux qui étaient nés de père et de mère ivoiriens. Ce concept, créé pour écarter Alassane Dramane Ouattara du pouvoir, a plongé la Côte d’Ivoire dans l’instabilité. Il reste toujours dans les mémoires. « Son plus gros échec, c’est l’ivoirité. Ce concept est à la base de la division du pays et a engendré beaucoup de chaos », se rappelle Esaïe.
Un possible éclatement du PDCI
Le décès de Henri Konan Bédié ouvre le débat sur l’avenir du parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) dont il était le président. Pour certains, sa disparition n’aura aucun impact sur l’avenir du pays car « la relève a été bien préparée vu son âge avancé ».
« Je pense que le PDCI pourra se relever comme ce fut le cas après la mort du père fondateur, Félix Houphouët-Boigny. Le parti est bien resté au-devant de la scène politique de 1960 à nos jours; j’estime donc qu’il pourra demeurer », déclare un membre de la communauté ivoirienne.
Les plus sceptiques se demandent si « avec cette disparition brusque, la relève a été préparée. Certains vont vouloir se positionner et on risque d’avoir une scission au sein du PDCI », estime Laurent Yaméogo, professeur burkinabè ayant vécu en Côte d’Ivoire. Esaïe abonde dans le même sens. « L’avenir du PDCI sans le président Bédié est un peu trouble car aucune figure majeure ne se démarque pour le moment. On risque d’assister à l’implosion du parti sur le choix du successeur », estime-t-il.
La vie politique va connaître un chamboulement
Tous sont unanimes: la disparition de Henri Konan Bédié va secouer la vie politique ivoirienne. « Cette disparition permettra peut-être l’apparition d’une nouvelle génération de politiciens« , souhaite Esaïe.
Pour Adama Nikièma, journaliste burkinabè ayant vécu en Côte d’Ivoire, « cette disparition va peut-être modifier l’envie des deux autres personnalités restantes du trio (Alassane Dramane Ouattara et Laurent Gbagbo) à non seulement se raviser pour la présidentielle de 2025, mais aussi se réconcilier véritablement et passer la main à la nouvelle génération ».