L’affaire commence à révéler ses secrets. Il y a quelques jours, le Chef de l’Etat, le Capitaine Ibrahim Traoré, a annoncé un détournement de fonds, estimé à « plusieurs milliards de francs CFA », au ministère en charge de l’Action humanitaire. Précisant que « la police a fait un excellent travail d’enquête » et que le dossier a été transmis « à un tribunal ». Ce matin, en conférence de presse, à Ouagadougou, le Procureur du Faso, Blaise Bazié, annonce l’arrestation de trois personnes. Ajoutant que ce dossier à forte odeur de gros sous « sera jugé lors de la première session du pôle économique et financier qui se tiendra du 15 au 30 novembre ».
L’un des gestionnaires de comptes du ministère, Hamidou Tiégnan, a été arrêté. Deux de ses présumés complices également. Selon le procureur du Faso près le Tribunal de grande instance Ouaga 1, Blaise Bazié, « ils ont été placés sous mandat de dépôt pour faux en écriture publique, usage de faux, détournement de fonds publics, enrichissement illicite et blanchiment de capitaux ».
Les éléments de l’enquête, cités par le Procureur, révèlent que Hamidou Tiégnan avait la responsabilité de la gestion du compte Trésor du ministère, intitulé « Renforcement de la protection sociale (PRO-SOC) ». Les fonds de ce compte étaient destinés aux personnes déplacées internes (PDI). Il aurait « imité et reproduit les signatures de ses supérieurs hiérarchiques afin d’émettre des chèques-Trésors à son nom ou au nom d’un complice ». Il a ainsi créé des états financiers fictifs dans le but de dissimuler les écarts de comptes.
Mais cette « supercherie » a fini par l’éclabousser suite à une plainte introduite à la police par le directeur de la gestion des finances du ministère. Ce dernier l’avait accusé « de détournement de fonds publics, faux et usage de faux en écriture publique et blanchiment de capitaux, causant un préjudice à l’État, estimé à plusieurs milliards de francs CFA ». Les faits se sont déroulés entre 2020 et 2024.
Selon le procureur, l’enquête a également permis de saisir d’importants biens. Par exemple des véhicules de luxe, des camions citernes, des cars de transport en commun. Mais aussi plusieurs parcelles. Et même une ferme où se trouvent des animaux de grande valeur. Si l’on en croit les premières estimations révélées par le Procureur, les biens saisis sont évalués, en ce qui concerne les numéraires, à 166 millions de francs. Ces fonds seront déposés à l’Agence nationale de gestion et de recouvrement des avoirs saisis ou confisqués. « La valeur des biens meubles constitués essentiellement de véhicules est estimée à 471 250 000 FCFA selon les mis-en-cause. Quant à la valeur des immeubles, elle est estimée à plus d’un milliard cinq-cent millions de francs CFA », confie le Procureur Bazié.
Les personnes arrêtées devront pouvoir s’expliquer lors de la prochaine session du pôle économique et financier, prévue du 15 au 30 novembre. Selon le Procureur, huit autres dossiers impliquant une centaine d’agents publics seront également jugés. Il s’agit, là aussi, de détournements présumés de deniers publics et d’autres infractions assimilées. Dans le lot, un dossier relatif à une plainte de l’Agent judiciaire de l’État (AJE) contre un agent public, Stanislas Kinda. Il est poursuivi pour faux et usage de faux et détournement de deniers publics, estimé à 578 472 419 francs CFA.