
Marine Le Pen, députée française et leader d’extrême-droite, a achevé dimanche 16 mars, une visite au Tchad. Elle y était invitée par le Président, le Maréchal Mahamat Idriss Déby Itno. Pour son second voyage dans ce pays du Sahel après celui de 2017, la dirigeante du Rassemblement national (RN) a été reçue par le Chef de l’État tchadien. Elle a également eu des échanges avec les membres du parlement. Objectif : retisser les liens entre N’Djamena et Paris dans un contexte de brouille diplomatique, engendrée notamment par le départ des troupes françaises du sol tchadien. Mais cette “communion fraternelle”, bâtie sur un “amour d’antant”, recherchée par Le Pen ne fait pas l’unanimité au sein de l’élite dirigeante au Tchad.
Avec à ses côtés Louis Aliot, maire de Perpignan, et Renaud Labaye, Secrétaire général du groupe parlementaire RN, Le Pen a eu droit à tous les honneurs au Tchad. Elle s’est entretenu avec le Président Mahamat Idriss Déby dans sa résidence privée à Amdjarass, fief de la famille Déby où le Chef de l’État réside pendant le mois de ramadan.
Marine Le Pen a aussi été reçue en audience par le président de l’Assemblée nationale du Tchad, Ali Kolotou Tchaïmi. Ce tête-à-tête à été suivi d’une rencontre élargie aux membres du Bureau de l’Assemblée nationale, aux présidents des groupes parlementaires, aux Secrétaires généraux, aux directeurs de cabinet et directeurs généraux.

Et c’est là que l’opposition pointe le doigt et exprime son désaccord. En effet, l’opposant Max Kemkoye, président du groupe Gcap, s’interroge sur le faste protocolaire réservé à Marine Le Pen, qu’il juge « inédit et incongru ». Pour lui, le parti au pouvoir, le Mouvement patriotique du Salut, se réclame socio-démocrate. Il est donc loin des idées du Rassemblement national, déclare-t-il avec force. Selon Kemkoye, entre Le Pen et Itno, la relation est essentiellement mercantiliste et financière.
Mais pour Ali Kolotou Tchaïmi, le président de l’Assemblée nationale du Tchad, cet accueil n’a rien d’inhabituel. “C’est une visite parlementaire, un petit tapis déroulé; on le fait à toutes les personnalités qui aiment le Tchad et qui viennent nous rendre visite à l’Assemblée. Ce n’est pas une spécificité, mais il faut reconnaître que Marine Le Pen est certes une personnalité française, mais qui aime le Tchad”, a-t-il indiqué.
Cette visite suscite également de vives réactions au sein des “défenseurs du panafricanisme”.
“J’ai vu et il faut aussi que vous voyez. Nous sommes en 2025, (…) le président tchadien invite Marine Le Pen en visite officielle et met l’avion présidentiel à sa disposition pour ses déplacements”, tance Nathalie Yamb, une militante politique panafricaine pro-Kremlin d’origine camerounaise.
Même son de cloche chez Egountchi Behanzin, lui aussi activiste et militant panafricain. Sylvain Dodji Afoua (son vrai nom), Togolais, président de la Ligue de défense noire africaine (LDNA), estime qu’il s’agit d’une “humiliation suprême”. Il décrit la formation politique de Le Pen comme “un parti xénophobe, raciste, négrophobe et islamophobe”. Ajoutant que “tout cela se fait au nom des intérêts de la Françafrique, du néocolonialisme”.
Mais pour N’Djamena, Le Pen est un “interlocuteur de poids”. “Même si Marine Le Pen ne détient pas de mandat diplomatique officiel, son influence sur la scène politique française et ses prises de position sur l’Afrique, font d’elle un interlocuteur de poids”, déclare la Présidence du Tchad.